René DUDOT (?, c.1615/1620 – ?, après 1659)
Vierge à l’Enfant avec saint Jean-Baptiste pendant la fuite en Egypte
Huile sur toile d’origine
73 x 57 cm
Vers 1645
Artiste à la biographie lacunaire et au corpus encore réduit, René Dudot illustre les interactions artistiques entre Paris et la Province (en l’occurrence Rouen et la Normandie) au milieu du XVIIème siècle dans le domaine de la peinture religieuse. La naissance de ses enfants dans la capitale et leurs baptêmes dans des églises parisiennes entre 1640 et 1649 laisse à penser qu’il serait né vers 1615/1620, et donc quasi contemporain de peintres comme Charles Lebrun, Eustache Le Sueur ou Sébastien Bourdon.
En 1651 Dudot apparaît pour la première fois dans les archives de Rouen, où il est reçu le 22 décembre 1653 à la Maîtrise des peintres de la ville. Il illustre en 1652 le frontispice d’une édition locale d’une Vie de saint Romain, puis en 1653 il réalise dix-neuf vignettes pour l’Immitation de la Vie de Jésus. Deux ans plus tard, les comptes de la cathédrale de Rouen stipulent un règlement de soixante livres, payé pour un tableau d’autel dédié au nouveau retable de la sacristie, parmi d’autres décors effectués. Très actif dans la cité normande, il reçoit des commandes pour l’église Saint Patrice, celle des Cordeliers, plusieurs couvents, l’abbaye Saint-Martin de Boscherville, et y diffuse ainsi des œuvres très marquées par l’atticisme parisien dont il peut se revendiquer. Ses tableaux sont effectivement bien proches du classicisme de Bourdon ou de Le Sueur (la mise en page de notre toile est très comparable à celle de la Vierge à l’Enfant de Le Sueur conservée au Louvre – Inv 8493).
Son expérience parisienne et sa notoriété sont assez grandes en 1659 pour qu’un May (tableau destiné à Notre-Dame, offert chaque année le 1er mai par la corporation des Maîtres orfèvres parisiens) lui soit commandé, Saint Pierre ressuscite la veuve de Tabitha (tableau perdu).
C’est grâce à un tableau signé, conservé au musée des Beaux-Arts de Rouen, et par quelques très rares gravures que l’œuvre du peintre fut ressortie de l’oubli au cours du XIXe siècle. Depuis, les physionomies typiques de l’artiste ont permit de lui réattribuer plusieurs tableaux, pour la majorité conservés chez des particuliers. Petits nez pointus, visage doux aux traits fins, chairs claires relevées de zones empourprées, telles sont les caractéristiques que Dudot donne à ses figures.
Tout en étant une composition classique dans l’Histoire de l’Art, notre tableau comporte ainsi des morceaux d’une remarquable qualité : le serre-tête de la Vierge et son rendu presque métallique, la grande douceur et la noblesse de son visage (qui rappelle davantage ceux de Vouet que ceux de Nicolas Loir comme on l’indique parfois), la délicatesse de ses mains, et une certaine originalité dans le traitement quelque peu rubénien des deux enfants.
Il reste probablement de nombreuses œuvres de Dudot à redécouvrir, aujord’hui présentées sous d’autres noms, tel le tableau du Fogg Art Museum de Cambridge à Harvard, un temps attribué à Bourdon et actuellement donné à Nicolas Loir.