Louis-Joseph LE LORRAIN (1715, Paris – 1759, Saint-Petersbourg) et Julien-David LE ROY (1724, Paris – 1803, Paris)
Vue des ruines de l’Odeum à Athènes
Encre et lavis sur traits de crayon et rehauts de blanc
28 x 45 cm
Porte une signature Joseph Vernet f. en bas au centre
1755/1757
Oeuvre en rapport: planche N°IX (gravée au burin par Jacques-Philippe Le Bas) de l’ouvrage Les ruines des plus beaux monuments de la Grèce, publié en 1758, pour laquelle notre dessin est préparatoire
Julien-David Le Roy est un intéressant et important représentant de l’architecture au XVIIIème siècle.
Théoricien du genre, il affirmera la supériorité du style Grec sur le Romain et encore davantage du style Antique en général sur le style Médiéval. Membre de l’académie royale d’architecture, dont il est nommé historiographe en 1762, il travaille pour le marquis de Voyer sur les chantiers de l’hôtel d’Argenson et du château des Ormes en Touraine. Parmi ses élèves à l’académie d’Architecture, où il devient professeur en 1774, on compte par exemple Percier et Lebas. Le Roy écrira également des ouvrages sur la marine et la construction navale.
Formé auprès de l’architecte Jacques-François Blondel, grand prix de Rome en 1750, Le Roy effectue son voyage d’études en Italie entre 1751 et 1754, où il travaille notamment aux côtés de ses confrères Charles-Louis Clérisseau (arrivé à Rome en juin 1749) et Marie-Joseph Peyre (grand prix de Rome en 1751). Voulant prendre de vitesse les architectes anglais James Stuart et Nicholas Revett qui souhaitaient réaliser un recueil des antiquités athéniennes, il arrive dans la cité grecque le 1er février 1755, après être parti de Venise en mai 1754 et avoir séjourné à Constantinople entre-temps. Il y effectue relevés et dessins des monuments antiques en l’espace de quelques semaines, avant d’être de retour à Rome pour l’été, puis en France à la fin de l’année.
Il reçoit alors le soutien du comte de Caylus pour faire graver ces dessins et les publier en 1758 dans Les ruines des plus beaux monuments de la Grèce; dans cet ouvrage, Le Roy est décrit comme « Ancien pensionnaire du Roi à Rome et de l’Institut de Bologne« . L’oeuvre connut un grand succès et contribua significativement à la popularité du goût grec dans l’ensemble des arts décoratifs.
Toutefois, il semble acquis que, selon les Mémoires de Charles-Nicolas Cochin, si Le Roy a bien exécuté in situ les vues des sites grecs, celles-ci étaient davantage des croquis de qualité discutable que des compositions abouties, et qu’elles ont été redessinées par Louis-Joseph Le Lorrain.
Ce dernier fut à la fois, avec un égal talent, architecte, décorateur, designer de mobilier, graveur et peintre; élève de Dumont le Romain, il remporta le grand Prix de Rome de peinture en 1739, et passa dix années en Italie. Proche du comte de Caylus, adepte du goût antique (il crée pour le collectionneur Lalive de July tout un ensemble de mobilier selon le « goût grec » en 1756), sa collaboration active à l’ouvrage de Le Roy n’a donc rien d’étonnant.
Notre dessin présente une étonnante modernité et on pourrait presque penser qu’il a été réalisé au cours des vingt dernières années du XVIIIème siècle; on ne peut nier également un style (traitement du ciel, personnages étirés…) qui rappelle celui de Jean-Baptiste Hilaire (1753-1823), artiste qui lui aussi visitera la Grèce ainsi que l’Asie mineure et publiera l’ouvrage illustré Le voyage pittoresque de la Grèce en 1782. Hilaire, qui fut l’élève de Clérisseau vers 1768/69, a probablement été influencé par l’ouvrage de l’ami de son maître.
Le sujet en est le Pnyx, également appelé l’Odeon de Périclès, compris entre le rocher de l’aréopage sur la droite et une mosquée et un cimetière turc sur la gauche. Ce site, construit au milieu du Vème siècle av. JC, était dédié au chant et au théâtre.