Florent-Fidèle-Constant BOURGEOIS (1767, Guiscard – 1841, Passy)
Jean-Jacques Rousseau à Ermenonville
Lavis d’encre sépia
20 x 13,5 cm
Situé « Ermenonville » en bas à gauche et monogrammé « J.J.R. » en bas à droite sur un montage ancien (original ?)
1807/1808
Oeuvre en rapport: gravure (planche N°36) illustrant l’ouvrage « Description des Nouveaux Jardins de la France et de ses Anciens Châteaux » publié en 1808 , titrée La pyramide du philosophe, pour laquelle notre dessin est préparatoire
Constant Bourgeois semble avoir été élève dans l’atelier de Jacques-Louis David, où il se spécialisa dans le paysage. Il est très souvent confondu avec un autre Bourgeois, Bourgeois du Castelet, dont on sait peu de choses, sauf qu’il fut d’abord un militaire puis un peintre paysagiste qui exposa à partir de 1822 au Salon.
Exposant ses oeuvres à tous les Salons de 1791 à 1830, c’est avant tout un extraordinaire dessinateur; Paul Marmottan, dans son « Ecole française de peinture, 1789-1830 », évoque ainsi sa « grande pureté de style et l’exécution brillante de ses dessins, la plupart très remarquables, notamment ceux au lavis » . Très recherché et apprécié de son vivant, Bourgeois reçut de nombreux prix et récompenses artistiques, un logement au Louvre, et la Légion d’honneur en 1827.
Notre dessin, d’une belle finesse, est préparatoire à la gravure (exécutée par Legrand), titrée La pyramide du philosophe, illustrant en page 90 l’ouvrage « Description des Nouveaux Jardins de la France et de ses Anciens Châteaux » d’Alexandre de Laborde, publié en 1808 par l’Imprimerie de Delance.
Les dessins de cet ouvrage furent tous réalisés par Bourgeois, et 17 avaient pour sujet le domaine d’Ermenonville, le nôtre correspondant à la planche 36.
Le texte accompagnant la gravure était le suivant: « Ce petit monument est une pierre pyramidale à quatre angles, consacré aux quatre Chantres de la campagne: Théocrite, Virgile, Gessner et Saint Lambert. Sur chacun des côtés sont écrits leurs noms; cette chétive pyramide n’est pas digne de son objet » .
Le titre de la gravure fait évidemment référence à Rousseau, ici représenté lors d’une de ses promenades, mais que curieusement, Bourgeois retira de la version gravée, par ailleurs quasi-identique au dessin. La Vue de l’étang du désert, la dernière gravure de la série consacrée à Ermenonville, est la seule à représenter Rousseau; notre dessin peut laisser penser que Bourgeois avait à l’origine choisit d’inclure Rousseau dans plusieurs autres vues.
Situé dans la partie sud du parc d’Ermenonville, non loin de l’île des peupliers et du chêne dit « de Palémon », le petit édifice était construit en briques; il a aujourd’hui disparu. On en trouve une autre iconographie dans la planche N°13 de Merigot fils (1738 ? – 1818) illustrant la « Promenade ou itinéraire des jardins d’Ermenonville », publié en 1788 par le marquis de Girardin, propriétaire des lieux.
Girardin avait hérité du domaine au début des années 1760 et l’avait transformé en un parc à « l’anglaise » grâce aux conseils de l’architecte Morel et d’Hubert Robert. Il invita Rousseau, qui désirait quitter Paris, à y séjourner à partir du 20 mai 1778; le vieux philosophe genevois y passa les six dernières semaines de sa vie, multipliant les promenades solitaires dans cette nature à la fois domestiquée et sauvage.
Dans ce même recueil des « Nouveaux jardins de la France… », Bourgeois représenta un autre lieu lié à JJ Rousseau, Montmorency, avec l’Ermitage, la fermette que Madame d’Epinay avait offert à Rousseau en 1756, et où celui-ci avait écrit la Nouvelle Héloïse.
Quant à Alexandre de Laborde (1773-1842), incarnation à l’époque de la défense du patrimoine, il avait déjà collaboré avec Bourgeois à l’occasion de la réalisation du « Voyage pittoresque et historique de l’Espagne ».