Théodore JUNG (Strasbourg, 1803 – Strasbourg, 1865)
Paris, la fontaine du Cirque, près des Champs-Elysées
Aquarelle gouachée
20,5 x 30,5 cm
Signée en bas à gauche
Vers 1841
Elève de Siméon Fort, Théodore Jung fut avec Gaspard Gobaut un des principaux artistes du Dépôt de la Guerre, essentiellement à l’époque de Louis-Philippe, mais aussi sous Napoléon III. Ces artistes étaient chargés de réaliser des aquarelles sur la base de croquis fournis par des officiers sur les terrains d’opérations (Algérie, Italie, Mexique, Crimée,…) ; mais ils représentaient aussi des épisodes militaires du 1er Empire.
En tant que fonctionnaire, Jung avait pour atelier son bureau du ministère de la Guerre ; il touchait un traitement mensuel de 5 000 Frcs et n’avait pour ainsi dire pas d’occasion de vendre personnellement ses oeuvres, en dehors de celles qu’iI réalisait pour de hauts militaires souhaitant se rappeler leurs campagnes passées.
Jung ne se limita cependant pas au genre militaire et produisit de nombreuses vues urbaines de Paris, quelques paysages et même des études d’arbres en forêt de Fontainebleau par exemple. Exposant au Salon entre 1834 et 1864, la plupart de ses oeuvres sont conservées au château de Versailles, à Compiègne, ou encore dans plusieurs services du ministère de la Défense. Qu’il s’agisse de très grands formats, ou de travaux de dimensions réduites, son travail est toujours d’une fine exécution.
Notre aquarelle, très vivante, est un beau témoignage de l’ambiance parisienne sous la Monarchie de Juillet, et de l’influence de l’architecte Hittorff sur le quartier des Champs-Elysées.
Jacques Ignace Hittorff (1792-1867), natif de Cologne, arriva à Paris en 1810 et entra aux Beaux-Arts l’année suivante, dans le cours de Charles Percier ; il gagna aussi le soutien de François-Joseph Belanger (l’ancien architecte de Bagatelle et du comte d’Artois, futur Charles X), ce qui lui permit de travailler sur des chantiers royaux. Finalement nommé architecte des Champs-Elysées par Louis-Philippe, il sera « mis de côté » par Haussmann sous le Second Empire.
A côté de l’aménagement de la place de la Concorde, Hittorff travailla en même temps, à partir de 1834, sur celui des jardins latéraux de l’avenue des Champs-Elysées. Il y disposa des massifs à l’anglaise et y éleva, après celles de la Concorde, quatre fontaines, différentes mais d’un modèle unique, reposant sur une base circulaire, avec un piédestal soutenant une vasque par laquelle l’eau s’écoulait.
Côté sud des Champs-Elysées se trouvait la Fontaine de Diane, entre l’actuel Petit-Palais et le Carré Ledoyen. Côté nord, étaient successivement implantées la Fontaine des Ambassadeurs (ou Fontaine de Vénus), près de la Concorde, puis la Fontaine de la Grille du Coq (que l’on aperçoit au fond de notre aquarelle), construite en 1840, et enfin la Fontaine du Cirque, sujet de notre aquarelle, construite en 1839.
Cette dernière portant aussi le nom de Fontaine des Quatre Saisons, représentées par les quatre enfants soutenant la vasque supérieure, et sculptés par Augustin Barre.
A gauche de la fontaine dans notre aquarelle, à l’emplacement de l’actuel restaurant Laurent, se trouvait depuis la Révolution de 1789 une guinguette, restaurée par Hittorf en 1842. L’allée menant jusqu’à la Fontaine de la Grille du Coq n’est pas encore occupée par une petite salle de spectacle, la salle dite Lacaze, en activité à partir de 1848, qui sera remplacée en 1855 par le théâtre des Bouffes Parisiens d’Offenbach. Démoli en 1881, ce dernier sera remplacé par une attraction, le Panorama Marigny construit par Charles Garnier, puis par le théâtre Marigny (créé par Edouard Niermans à la fin du XIXème siècle, et qui subira quelques modifications jusqu’à nos jours). Sur la droite de la composition, donc à l’ouest de la fontaine, se trouvait le Cirque d’été, édifié en 1841 par Hittorff.